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18 octobre 2012 4 18 /10 /octobre /2012 16:25

Monsieur le Président,

Chers Collègues,

Mesdames, Messieurs,

 

Une décision Modificative n°1 qui s’inscrit en cohérence avec des orientations budgétaires 2013 qui constituent l’élément essentiel de notre séance plénière de ce jour, c’est-à-dire qui perpétuent le dogme de l’austérité qui semble vous être si cher envers et contre toutes les souffrances sociales qui s’aggravent chaque jour. Un dogme qui ne détonne pas avec des orientations nationales qui, faute d’un changement qui reste aux abonnés absents, perpétue la poursuite de la punition austéritaire. Un changement dans la continuité en quelque sorte qui n’est pas pour vous déplaire puisque vous avez su vous rassembler avec l’actuelle majorité parlementaire pour voter le traité carcan qui dorénavant, depuis Bruxelles, imposera aux États, donc à la France, la définition des grandes orientations économiques des politiques nationales.

 

Un vote grave de conséquences, puisqu’avec la mise des politiques budgétaires non seulement de l’Etat, mais aussi des collectivités territoriales et de la protection sociale sous la tutelle d’organismes dépourvus de toute légitimité démocratique comme la Commission Européenne et la Banque Centrale Européenne, vous gravez dans le marbre des abandons majeurs de souveraineté nationale au profit d’organismes non élus avec une automatisation de sanctions financières qui représentent une atteinte sans précédent contre les fondements de notre République et de la démocratie. En effet, quel que soit le verdict du vote populaire lors des scrutins électoraux, ce Traité obère toute possibilité d’un réel changement de cap en enfermant les politiques économiques dans la camisole de force d’une austérité sans issue. Et cela, non seulement pour le budget de la Nation, mais aussi pour celui des collectivités territoriales, pourtant déjà bien sinistrées du fait de la politique d’asphyxie financière que vous avez soutenue ces dernières années, par le biais d’une recentralisation insidieuse au moyen de transferts de charge très incomplètement financés et d’une remise en cause sans précédent de leurs prérogatives démocratiques. Notamment au travers de la funeste loi sur les collectivités imposée à marche forcée par la précédente majorité dont vous étiez et dont l’abrogation, promise par les responsables de la majorité actuelle, apparaît plus que jamais incertaine.

 

Ce traité, resté identique à la virgule près à la mouture Merkozy comme le Premier-Ministre a été contraint de le reconnaître lors du débat à l’Assemblée, dogmatise, sanctuarise et aggrave des politiques qui enferment l’Union Européenne et particulièrement la zone Euro dans une spirale d’austérité et de récession au seul profit des marchés financiers. Ce que d’ailleurs a souligné le rapport 2012 de la Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement et qui démontre où ont conduit les politiques d’austérité imposées par Bruxelles pour des pays comme la Grèce, l’Espagne, l’Italie ou le Portugal.

 

Est-ce donc le tour de la France d’entrer dans cet infernal maelström récessif ? Tous les indicateurs économiques mais surtout politiques sont là pour nous le laisser craindre. Cette fuite en avant austéritaire n’offre comme seule issue que la souffrance des peuples pour satisfaire aux appétits de la finance, sans ouvrir aucune perspective de sortie comme le dénoncent des économistes pourtant peu réputés pour leur fibre révolutionnaire, à l’exemple de l’ancien Prix Nobel d’économie, Joseph Stieglitz.

 

Dès lors, il n’y a pas lieu de s’étonner de constater que vos orientations budgétaires 2013 s’inscrivent dans le droit fil des injonctions de Bruxelles relayées sans coup férir par Matignon. J’avoue avoir été stupéfait en lisant votre diatribe contre le gouvernement actuel à propos des incertitudes pesant sur la LGV où vous vantez l’investissement comme un élément déterminant de compétitivité. Venant de vous, qui avez  fait le choix, contre nos avis réitérés, de réduire l’investissement départemental de 185 M € depuis 2008, soit moins 45,7 % avec qui plus est un taux d’exécution des dépenses d’investissement qui a baissé dans le même temps de 16 %, le couplet peut paraître pour le moins osé.

 

D’ailleurs, où sont les orientations économiques par la relance des investissements qui seraient de nature à favoriser l’emploi et l’activité des PME-PMI de notre département ?

Le BP2012 traduisait déjà la poursuite de la baisse des investissements, rien n’indique tant dans la DM que dans vos orientations budgétaires que vous comptez inverser cette tendance, pourtant si désastreuse pour l’économie locale.

 

Devons-nous nous résigner à subir encore l’attitude des banques qui privent les collectivités de moyens financiers pour leurs investissements ? Un dossier de notre séance est là pour le démontrer. Et le Traité que vous avez voté à Paris les y encourage. Plus que jamais se pose la nécessité d’un grand pôle financier public pour soutenir les investissements des Collectivités Territoriales.

 

Devons-nous accepter comme une fatalité la disparition de la taxe Professionnelle qui prive les communes et les départements de moyens financiers pour satisfaire aux attentes des populations et sape leur autonomie financière. Le rapport du « groupe de travail sur la maîtrise des finances locales », présidé par votre collègue au Parlement Gilles Carrez, précise que la part des ressources locales dont les départements avaient la maîtrise est passée du fait de cette mesure de 35 % à 16 %, c’est dire ! Et n’est-ce pas une aberration que cette mesure qui dissocie l’activité économique du territoire où elle s’exerce, sachant que les collectivités représentent plus de 70 % de l’investissement public ! N’est-il pas des plus logiques que les entreprises contribuent au financement d’infrastructures, d’équipements et de services dont elles bénéficient pour leur activité ? Voilà une recette que très rapidement le gouvernement devrait réinstaurer et susceptible d’obtenir votre aval. D’autant plus que les dernières études situent à 175 milliards le montant total des exonérations fiscales accordées en 2011 au patronat lorsque votre majorité exerçait encore le pouvoir. Le moins que l’on puisse dire est que les « pigeons » ont été grassement nourris lors du quinquennat précédent.

 

Allons-nous devoir nous plier sans broncher, comme sous le précédent gouvernement, au rabougrissement des concours financiers de l’État pour les Collectivités, dans un processus de recentralisation insidieux ? Vos orientations budgétaires en tout cas s’inscrivent dans la continuité des choix qui ont été les vôtres jusqu’à maintenant, celui d’accompagner l’austérité, quand ce n’est pas la devancer, plutôt que d’exiger que l’État honore ses dettes. Non seulement le gouvernement actuel n’a pas la volonté de s’acquitter des sommes dues par le précédent gouvernement au titre du transfert de charges, mais de plus, comme l’avait annoncé François FILLON alors Premier Ministre, Jean-Marc AYRAULT, l’actuel locataire de Matignon, confirme pour 2013 le gel du niveau de dotations de l’État pour les Collectivités mais aussi leur recul de 750 M € tant en 2014 qu’en 2015.

 

C’est un choix économique particulièrement dangereux, dans lequel vous vous inscrivez sans états d’âme. Priver les collectivités de ressources, c’est inévitablement induire un recul des investissements qui ne pourra qu’avoir une répercussion sur l’activité économique sachant l’importance de la commande publique dans ce domaine, comme les chiffres le montrent. C’est aussi invariablement impacter le niveau des services rendus aux populations, d’autant plus sachant l’importance de l’intervention des départements dans l’action sociale. Voilà qui correspond bien à une logique de récession.

 

Cette confiscation de moyens pour les Collectivités Territoriales, préfigure-t-elle ce que certains appellent l’acte 3 de la décentralisation ?

 

L’intervention du Président de la République lors des États Généraux n’est pas pour nous rassurer en ce domaine. En effet, elle enferme d’emblée le processus de réforme dans ce qu’il appelle le redressement des comptes publics et le redressement productif en insistant sur le fait que les collectivités locales doivent « participer à l’effort », l’œil rivé sur les exigences de l’Union Européenne et du traité budgétaire. Au-delà du couplet paternaliste sur la valeur de l’apport des collectivités locales, cet appel à « l’effort » de la part des collectivités apparaît déplacé lorsque les chiffres montrent qu’elles ne contribuent qu’à hauteur de 8 % à la dette publique. Il n’est pas tenable de réduire les recettes et l’autonomie financière des collectivités d’un côté pour simultanément transférer, sous couvert de « proximité », de nombreuses charges vers la sphère locale, dont certaines relèvent à l’évidence de la solidarité nationale, comme pour le handicap ou le maintien de l’autonomie par exemple.

Il est impératif de prendre des mesures pour restaurer l’autonomie des collectivités qui garantissent la libre administration des collectivités locales au service des citoyens et leur permettent de s’inscrire dans une logique de coopération solidaire plutôt que dans une compétition suicidaire. Nous ne pouvons qu’être inquiets de la confirmation des métropoles, même avec un nouveau statut, bénéficiant de transferts de compétences des autres collectivités qui réduiront à peau de chagrin le rôle et la place des communes et départements. Nous le vivons d’ailleurs d’ores et déjà dans notre propre département avec une Métropole qui décide de tout, pour tout le monde, avec des communes et un Conseil Général sous tutelle qui sont là pour financer des projets imposés afin de satisfaire les intérêts des grands groupes et l’égo de quelques personnalités.

 

Puisque le débat sur cette nouvelle réforme est devant nous, nous en appelons à la mobilisation des élus et des citoyens pour agir auprès des parlementaires et porter les propositions donnant aux collectivités locales les moyens démocratiques et financiers de contribuer à une croissance utile et durable, qui parte des besoins des populations dans un esprit de solidarité et de responsabilité. La seule pour sortir le pays de la crise. L’avenir n’est pas la réduction de la dépense publique, encore moins la diminution des moyens de fonctionnement qui, comme vous l’écrivez, serait « la seule de nature à dégager les marges de manœuvres budgétaires indispensables à notre mission d’assistance et de soutien ».

 

Bien au contraire il nous faut rompre avec ce dogme de l’austérité qui n’est porteur que de nouvelles difficultés pour les familles, les collectivités et l’économie de notre pays.

Notre pays et nos départements ont besoin d’une politique volontariste de relance de l’activité par l’investissement et le déblocage de financements au profit des entreprises et des collectivités pour générer de nouvelles recettes par l’emploi et la consommation.

Notre pays et nos départements doivent impérativement s’affranchir des injonctions de l’Union Européenne qui dictent nos politiques au seul profit de la finance et au mépris du suffrage universel. Des politiques dont la nocivité et l’innocuité sont pourtant manifestes.

Ce n’est que dans ces conditions que des orientations budgétaires pour l’État ou pour nos collectivités permettraient, comme vous le déclarez dans votre rapport, « de poursuivre prioritairement notre action dans le domaine du social et de la solidarité humaine au profit des publics fragilisés et de maintenir notre engagement en faveur de la solidarité territoriale … »

 

Je conclurais par cette citation de celui qui était alors le Président du principal groupe d’opposition à l’Assemblée, le 21 février 2012, et déclarait à propos de la « règle d’or » budgétaire approuvée récemment dans la foulée du Traité dont elle découle : "Nous n’acceptons pas d’enfermer les peuples dans une camisole, fût-elle cousue de fil d’or." Si la volonté de changement exprimée par les Français lors des scrutins du printemps dernier veut prendre corps, elle ne le pourra qu’à condition de détricoter ces chaînes travesties en fil d’or !

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