Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
13 décembre 2013 5 13 /12 /décembre /2013 17:52

Monsieur le Président,

Chers Collègues,

Mesdames, Messieurs,

 

Monsieur le Président, nous voilà donc à peine plus d’un mois après une première Assemblée consacrée aux orientations budgétaires à devoir reprendre sur le métier notre ouvrage, faute de visibilité budgétaire suffisante sur l’exercice à venir qui vous amène à reporter le débat sur le Budget Primitif 2014. Incertitudes sur nos recettes budgétaires pour l’année à venir mais aucun doute sur l’intangibilité de votre recette pour répondre aux enjeux de la situation actuelle : la volonté toujours réaffirmée de vous soumettre au dogme austéritaire de la réduction des dépenses publiques hors de laquelle vous ne voyez point de salut. Un choix que vous partagez avec le gouvernement actuel et que nous continuons à combattre tant les effets désastreux qu’il engendre, aussi bien au niveau départemental que national, sont manifestes.

 

Comme je l’avais exprimé lors de l’assemblée du 7 novembre dernier, c’est bien le comble des paradoxes que de vous voir reprocher à l’actuel Président de la République de ne pas tenir ses engagements, en raison de sa conversion au dogme austéritaire ! Si nous sommes restés constants dans notre opposition à cette logique, ce n’est pas le cas de tout le monde. Mais il est vrai qu’il vous est bien difficile de matérialiser une réelle opposition lorsque, dans un bel élan œcuménique, vous relayez sur le plan départemental les mêmes diktats austéritaires bruxellois que le gouvernement actuel. Dans la continuité des votes communs ayant permis l’adoption du Traité Merkozy d’assujettissement de notre pays ainsi que la dernière Loi sur les Métropoles.

 

Une difficulté illustrée notamment par la posture singulière de maires de communes rurales protestant à juste titre contre un charcutage des cantons qui signe l’effacement des territoires ruraux dans la représentation départementale alors que bon nombre d’entre eux ont du se soumettre à la logique métropolitaine qui, par le truchement de la dernière Loi sur les métropoles adoptée grâce à la complicité des parlementaires de la droite, organise la vassalisation de ces territoires ruraux.  

 

Vous nous communiquez quelques éléments supplémentaires sur nos ressources budgétaires, en particulier concernant les droits de mutation et le fonds de péréquation qui s’y attache. Des droits de mutation aléatoires par essence et dont nous avons maintes fois dénoncé la dangerosité de leur poids surdimensionné dans nos recettes. Mais prisonnier de votre obsession de réduction des dépenses publiques, vous ne voyez d’autre levier que d’évoquer le relèvement du taux sur les droits et taxes liés aux transactions immobilières qui risque d’avoir comme effet, dans un marché dont les chiffres de l’année 2013 montrent qu’il reste pour le moins atone, de le comprimer encore plus en renchérissant l’offre alors que la demande s’avère plutôt poussive.

 

Plutôt que de déplorer la création de dispositifs de péréquation qui pourraient contribuer à une logique de solidarité entre départements, il nous semblerait plus judicieux de pointer le différentiel croissant de couverture entre charges et compensations réelles relatif aux allocations individuelles de solidarité assurées par les départements au titre de l’APA, de la PCH et du RMI-RSA, même si, comme je l’avais déclaré le mois dernier, votre cure d’opposition vous a restitué une lucidité à laquelle vous ne nous aviez pas habitué durant le précédent quinquennat pour ce qui concerne la « fable » du financement à l’euro près des transferts de charges de l’État vers le Conseil Général. Nous avons toujours défendu, hier comme aujourd’hui, l’idée que ces politiques relevaient de la solidarité nationale et ne pouvaient rester seulement tributaires des moyens dont chaque collectivité dispose.

 

D’autant plus quand simultanément, non seulement les recettes diminuent mais l’autonomie fiscale des départements fond comme neige au soleil. Une situation aggravée, tout d’abord par la suppression de la Taxe Professionnelle que vous avez promue puis ensuite par le gel des dotations aux collectivités locales décidé par Fillon et soutenu par vous-même. Et plus encore par la baisse de 1,5 Milliard d’€ pour 2014 et 2015 de ces mêmes dotations décidée par l’actuel gouvernement. La purge d’austérité que nous dénoncions hier ne nous semble pas plus digeste aujourd’hui.

 

Pour poursuivre sur le contexte économique et social dans lequel intervient ce débat, comment ne pas aborder la situation de l’emploi avec un chômage massif dont les artifices statistiques qui vous servaient hier et qui resservent aujourd’hui ne masquent pas la réalité. Pour reprendre mon propos du mois dernier, au-delà d’un constat alarmant, quelles sont les actions qui traduisent une volonté politique de la part du département de contribuer à s’attaquer à ce fléau, notamment en soutenant par l’investissement l’activité des PME/PMI locales, premières créatrices d’emploi ? D’autant plus lorsque les derniers chiffres de l’emploi montrent que notre département se situe sur ce plan au dessus du taux national et que la pauvreté gagne du terrain dans les Alpes-Maritimes. C’est précisément l’inverse que vous mettez en œuvre, ainsi qu’en atteste l’évolution de l’investissement départemental passé en cinq ans sous les 200 Millions d’€ soit une diminution de + de 50 %.

 

C’est bien ce cercle vicieux qu’il faut rompre plutôt que de le creuser.

 

Vous évoquez ensuite le pouvoir d’achat des ménages, particulièrement atteint ces dernières années dans notre pays avec un impact évident sur la consommation mais aussi sur la production de biens. C’est pourtant bien l’orientation politique et économique de l’austérité à tout crin que vous défendez depuis des années qui en est la cause. Un choix source de dégâts sociaux considérables mais qui profite bien aux grands groupes, avec 40 milliards d’euros de dividendes distribués l’an dernier par les entreprises du CAC 40. Car tout le monde n’est pas logé à la même enseigne en matière de crise.

 

Lorsque vous évoquez aussi « 2 années de forte hausse de la fiscalité », faudrait-il savoir pour qui ? Pour les familles les plus modestes censées compenser, notamment par le biais de la TVA, tous les cadeaux fiscaux et autres exonérations par centaines de milliards d’euros offerts à la finance ( le total du manque à gagner pour l’État, des allègements accordés aux entreprises est de 172 milliards d'euros en année pleine, dont un peu plus de 30 milliards d'euros d’exonérations de cotisations sociales patronales). Certains tenants de votre sensibilité se lancent dans une campagne démagogique contre l’impôt, mais quelles sont donc leurs solutions pour répondre aux besoins de santé, d’éducation, de sécurité et de services publics de proximité ? Où trouver les moyens de la solidarité nationale, notamment pour financer les allocations individuelles de solidarité assurées par les départements au titre de l’APA, de la PCH et du RMI-RSA que nous évoquions plus haut ? La campagne sur le « ras-le-bol » fiscal vise surtout à masquer une inégalité croissante face à l’impôt, y compris concernant les entreprises lorsque le taux d’imposition des PME s’établit à 39% quand pour les groupes du CAC 40 il ne se situe qu’à 8% ! Non il n’y a pas trop d’impôts pour répondre aux besoins, il y a surtout un sentiment d’injustice face à une répartition de plus en plus inégalitaire, des cadeaux fiscaux et une évasion fiscale (60 à 80 milliards par an) insupportables.

 

Oui il y a besoin d’une grande réforme de la fiscalité marquée par la justice et qui devrait s’appuyer sur les mesures suivantes : baisse de la TVA qui touche d’abord les plus modestes, alors que vous en prônez une hausse significative en citant en exemple votre modèle MERKEL ; rétablissement d’un légitime impôt économique territorial assis sur le capital des entreprises, taxant les actifs financiers et prenant en compte l’évolution de la masse salariale et des effectifs, précaires compris. Renforcement de l’action contre l’évasion fiscale, un impôt sur le revenu de type universel à taux progressif et au nombre de tranches relevé, l’arrêt immédiat de toutes les exonérations pour les grandes entreprises, la prise en compte des revenus dans le calcul de la taxe d’habitation pour la rendre progressive. Voilà des mesures de justice qui porteraient la vraie marque d’une solidarité nationale et qui rendraient acceptables des impôts nécessaires.

 

Une réponse également sur le terrain de la pauvreté par le pouvoir d’achat : la hausse généralisée des bas salaires et le SMIC à 1700 €, plutôt que de préconiser comme vous le faites une baisse de ce que vous appelez des « charges sociales » qui ne sont qu’une partie du salaire fruit du travail des salariés ; On en verrait ainsi tous les effets bénéfiques sur la consommation, la situation de la sécurité sociale, les caisses de retraites, les retombées fiscales utiles.

 

Comment pouvez-vous, pour 2014, accompagner la politique de régression de ce gouvernement que vous transposez pour notre département dans vos orientations budgétaires quand dans notre pays, l’inégalité des revenus n’a cessé de se creuser. Où est la justice ?

 

C’est pourquoi nous ne pouvons souscrire à votre invitation de « soutenir cette stratégie de la maîtrise de la dépense publique ». C’est l’échec à coup sûr et chacun peut en constater les conséquences. D’année en année, nous allons de reculs en reculs alors que notre département, notre pays ont besoin d’une relance forte par la satisfaction des besoins et ils sont nombreux. Les moyens pour ce faire existent. Seules la volonté politique et les injonctions européennes l’empêchent. Il est plus que jamais urgent d’inverser cette tendance et de rendre à la politique tout son sens. Professer l’impuissance du politique face au pouvoir de la finance c’est nourrir la désespérance des peuples et faire le lit de la démagogie de l’extrême-droite. C’est ouvrir la porte au pire. Condorcet le disait en son temps : "Il ne peut y avoir ni vraie liberté ni justice dans une société si l'égalité n'est pas réelle."

 

Notre attachement républicain à ses valeurs nous inspire d’autres choix que ceux des privations pour le plus grand nombre au bénéfice de quelques-uns. C’est, dans les Alpes-Maritimes comme en France, se donner les moyens de répondre aux besoins de notre peuple. Il est urgent pour cela de s’attaquer à la prédation sans précédent des profits financiers spéculatifs privés sur les richesses créées par le travail afin de les mettre au service du bien commun. Nous vous invitons donc pour le prochain budget à savoir prendre en compte cet impératif de justice et d’équité.

Partager cet article
Repost0

commentaires